" Peut-on dire d’une ville qu’on la connaît ? A fortiori d’une ville-monde telle que Naples ? Žilda a arpenté les rues de Naples de long en large, il en a épuisé le moindre recoin. Dans l’église abandonnée Sacro Tempio della Scorziata, sur une porte rouillée de la Via Pedamentina San Martino, dans une impasse de la Sanita, sur le toit d’un immeuble du quartier du port… Une femme énigmatique, deux femmes qui se visitent ou une nonne dénudée… Une Meditazione, une Rinunciazione, une Visitazione… Loin du street-art, Žilda ne jette pas des propositions sur les murs, mais des pièces uniques, des peintures reprenant des tableaux oubliés, des peintres oubliés ; des pièces uniques conçues pour un lieu particulier de la ville. Žilda dialogue avec la ville et ses habitants, il en sonde la psychè, tissant un lien entre un monde ancien et la rumeur actuelle qui l’anime ; il crée une géographie intime de la ville, une connexion avec elle et ses habitants, qu’il faut sans cesse renouveler. Parce que l’art est mystère, un écho et une interrogation, parce que l’art, par essence, est à la fois éphémère et intemporel. Parce que la ville est toujours et jamais la même, parce que les murs parlent et que leurs paroles sont sans cesse recouvertes d’autres paroles, parce qu’à telle heure de la journée, à telle saison, un ange dans une impasse s’éveille le temps d’un rayon de soleil, parce que la nuit recouvre les marches qui descendent depuis San Martino vers les quartiers espagnols. Parce que la femme énigmatique est à présent plongée dans le noir, enfermée dans le Sacro Tempio della Scorziata, alors que son souvenir continue de hanter ceux sur qui elle a posés les yeux. Et que ce souvenir convoque ceux des autres œuvres de Žilda, qui ont fait, font et feront, corps avec Naples."
Pierre Antoine Susini