FRAGILES FABULAE

Dans son nouveau projet, Žilda nous donne à voir des mythes puissants, ayant traversé un espace-temps considérable avant qu’il ne les fragilisent lors de ce glissement de la toile ou du livre au papier journal et à la rue. Ces mythes, ces fables, ces histoires, il les emprunte à une iconographie hétérogène et dense, de la tragédie grecque aux légendes celtiques, de la Bible à la mythologie latine et aux faits divers des journaux du XIXème siècle…
Ré-ouvrant cet imaginaire et nos imaginaires, il réinterprète par une technique mêlant dessin et esquisse des peintures de Murillo, du Corrège, de Prud'hon, de Bouguereau, de Füssli et d'autres, que l'histoire de l'art n'a pas retenues, Carlos Schwabe, Sascha Schneider, Elihu Vedder, toutes ces oeuvres ayant en commun une même puissance dans l'évocation de la passion et du tourment, à travers les thèmes de la solitude, de la mélancolie, du deuil, de la folie : « le beau est toujours bizarre ».
En installant ensuite la peinture dans la rue, le thème « classique » bascule dans l'espace moderne, et la photo vient fixer la lumière et capter la texture et la composition des murs. L'oeuvre s'envisage comme métissage des pratiques et des matières, dans ce tableau photographique où les frontières entre mise en scène et réalité sont déplacées. L'art de rue devient ce lieu où se mêlent peinture, scénographie et photographie.
L’espace quotidien et public s’étrangéifie au contact de ce réalisme infusé d’un romantisme sombre et cruel, teinté de fantastique; le temps, lui, se construira au fil des passants, dans leurs regards affabulateurs et dans la lente destruction d’une œuvre qui peu à peu s’efface.
Lubna S.


“D'octobre 2011 à juin 2012, Žilda exporte à Naples son projet  « Fragiles Fabulae ». La cité parthénopéenne devient un enfer habité par des anges blessés ; qui sait ce qui leur est arrivé mais quel meilleur endroit pour soigner leurs blessures ! Onze installations de papier, d’huile et d’acrylique qui revisitent et contextualisent des tableaux chers à l’artiste ; onze installations pour une esthétique de la déambulation, de l’aube au crépuscule, de la ville haute au port, du sombre ventre à la périphérie brûlée de lumière, une déambulation emportée par la torpeur effrénée et l’énergie circulaire de la ville. Onze mises en scène pour une politique du tragique et de la sensualité des corps dans la capitale de Pulcinella, de son génie comique et ambigu.” 

Lubna S.