FRAGILES FABULAE

Dans son nouveau projet, Žilda nous donne à voir des mythes puissants, ayant traversé un espace-temps considérable avant qu’il ne les fragilisent lors de ce glissement de la toile ou du livre au papier journal et à la rue. Ces mythes, ces fables, ces histoires, il les emprunte à une iconographie hétérogène et dense, de la tragédie grecque aux légendes celtiques, de la Bible à la mythologie latine et aux faits divers des journaux du XIXème siècle…
Ré-ouvrant cet imaginaire et nos imaginaires, il réinterprète par une technique mêlant dessin et esquisse des peintures de Murillo, du Corrège, de Prud'hon, de Bouguereau, de Füssli et d'autres, que l'histoire de l'art n'a pas retenues, Carlos Schwabe, Sascha Schneider, Elihu Vedder, toutes ces oeuvres ayant en commun une même puissance dans l'évocation de la passion et du tourment, à travers les thèmes de la solitude, de la mélancolie, du deuil, de la folie : « le beau est toujours bizarre ».
En installant ensuite la peinture dans la rue, le thème « classique » bascule dans l'espace moderne, et la photo vient fixer la lumière et capter la texture et la composition des murs. L'oeuvre s'envisage comme métissage des pratiques et des matières, dans ce tableau photographique où les frontières entre mise en scène et réalité sont déplacées. L'art de rue devient ce lieu où se mêlent peinture, scénographie et photographie.
L’espace quotidien et public s’étrangéifie au contact de ce réalisme infusé d’un romantisme sombre et cruel, teinté de fantastique; le temps, lui, se construira au fil des passants, dans leurs regards affabulateurs et dans la lente destruction d’une œuvre qui peu à peu s’efface.
Lubna S.

Žilda et l’art éphémère de la rue

Il cache son visage sous un masque, marche incognito dans les rues de Paris, Rome, Belgrade, bientôt celles de Hambourg. Žilda, un nom d’emprunt, serait le nouveau Banksy français, murmure-t-on dans la presse italienne. Žilda est l’étoile montante dans le firmament du street art européen.

L’artiste, originaire de Rennes, vient de passer quelques mois à Naples, où ses créations, des dessins et peintures grand format sur papier, ont défrayé la chronique : anges, démons, filles morbides. La nuit, il dépose des représentations mythiques dans des espaces urbains où l’effet est garanti, par exemple au beau milieu d’ordures ménagères en plein Naples.

Les titres qu’il leur donne sont chargés de poésie, comme « L’espoir éveille le cœur blessé ». Il copie les amants du tableau « Amour de Phrosine et Mélidore » et colle sa reproduction dans un port à un endroit où la marée les inondera. Ou peint des sirènes sur une épave de bateau, ou encore la poétesse Sappho sur un phare au fin fond de la Bretagne.

A Naples, il choisit pour ses œuvres classiques les coins les plus laids, accroche des peintures de la Renaissance et du baroque français dans des rues passantes, des dessins inspirés de gravures et d’illustrations du XVIIIe siècle sur des parkings de supermarchés. Ruptures, visions insolites, en un mot : street art ! Žilda utilise la ville comme galerie et comme atelier. METROPOLIS l’a suivi à Naples.

 Stefanie Appel




      Date de première diffusion : Sam., 13 oct. 2012, 14h40



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